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Le magatama: Symbole sacré et mystérieux

Très présent dans les rituels religieux mais aussi la culture populaire, le magatama est un symbole qui s’est honorablement octroyé une place en cette époque contemporaine. Bien que son nom d’origine ne soit mentionné tel quel, la prouesse la plus récente de ce bijou est sans douter son apparition constante dans le dernier Zelda, « Tears of the kingdom » de Nintendo. Cependant, avant même la sortie tant attendue de ce jeu vidéo, j’avais déjà droit à des questions très curieuses en présentant des magatamas aux marchés auxquels j’ai participé : « C’est la pierre dans Ace Attorney non ? », « Ce n’est pas le truc dans le sharingan de Naurto ? », « Ah mais il y avait cette forme dans un anime que j’ai adoré en étant jeune ! Tu connais Blue Seed ? » ou encore « Il n’y avait pas un item comme ça dans Onimusha ? ».

Quand je tentais d’expliquer cette fameuse amulette qu’est le magatama, il me faut admettre que j’ai souvent donné l’impression d’une vendeuse qui ne connaît pas son produit. Pour ma défense, cela est normal car nul ne peut affirmer réellement de quoi il s’agît.  Venant d’un temps tellement ancestral, les historiens ne parviennent pas à totalement percer le mystère autour de ce symbole. En somme, dire que j’aime revérifier mes sources avant de rédiger un article, aborder le magatama requiert un certain courage en analysant le peu d’informations éparpillées. Mais il en émane aussi une certaine aisance parce que c’est un sujet dont il n’y a pas d’obligations à dire la stricte vérité. Puisque personne ne peut le faire.

Du coup, ancien à quel point ? On retrace les magatamas à la période antique Jomon quand la matière la plus travaillée fut la terre cuite (environ 13’000 ans à 400 ans avant J.C). Les fouilles archéologiques ont permis de déterrer des bijoux en forme de « C » avec un trou. La légende dit que cette forme est inspirée d’un croc d’un animal. Il est possible que les chasseurs enlevaient les dents de leurs proies afin de les trouer et en faire des bijoux. Est-ce qu’ils portaient ces ornements comme trophées ou amulettes de protection face aux animaux redoutables ? A nouveau, mystère ! De plus, une autre théorie remet en cause cette anecdote. Comme quoi sa forme viendrait plutôt d’un fœtus. Ainsi, les femmes enceintes s’en paraient peut-être pour protéger leurs grossesses et futurs nouveau-nés.

Parlant de fouilles archéologiques, les recherches dans les tombeaux de la période Kofun ont rapporté d’autres magatamas qui étaient cette fois-ci conçu en pierre fine ou en verre (~300 à 538 ans après J.C). La seule information tangible que nous obtenons est l’évolution technologique qui permettait de travailler des matières plus nobles de manière plus précise. Et cette présence sur les sites mortuaires peut nous laisser présumer, avec prudence, que le magatama jouait un rôle sur la frontière entre les vivants et les défunts.

La raison pour laquelle il est compliqué de dire avec certitude comment vivaient les gens de ces époques est le manque de sources écrites. En effet, l’antiquité japonaise sera remplie de zone d’ombres jusqu’à ce que des mentions commence enfin à apparaitre dans les rédactions chinoises datées du début du premier millénaire de notre ère. Parmi les écritures, des bijoux donnés en offrande aux dynasties chinoises de la part du Japon nous laissent à supposer qu’il s’agissait de magatamas.

C’est au 8ème siècle avec la rédaction du « Kojiki » et le « Nihonshoki », point de départ de la religion shintô, que des témoignages plus clairs nous parviendront. Effectivement, plusieurs divinités dont la déesse du soleil Amaterasu, portaient des bijoux ornés de magatamas créés par le dieu Tamanoya-no-mikoto, divinité des bijoux. Parlant de la déesse solaire, il est raconté qu’elle croqua un magatama pour faire naître d’autres idoles. Restons encore sur elle afin de parler de cette grande tragédie où elle plongea le Japon dans l’obscurité en se retirant dans une grotte à la suite d’une querelle. Afin de la faire sortir, les autres divinités en panique décorèrent un miroir et un magatama sur une branche. Ces deux objets deviendront ensuite des trésors impériaux.

Maintenant que les trésors impériaux ont été abordés, penchons-nous un peu dessus. Il en existe trois : l’épée de Kusanagi (Kusanagi-no-tsurugi ), le miroir de Yata (Yata-no-kagami)  et enfin le magatama de Yasakani (Yasakani-no-magatama). Un mythe présume qu’ils représenteraient les trois dieux principaux :  le miroir pour Amaterasu – déesse du soleil, l’épée pour Susanoo – dieu des océans, et le magatama pour Tsukuyomi – dieu de la lune. Confirmer cette rumeur est complexe car le dernier, Tsukuyomi, est né avec les deux autres vers le début des contes shintôs… mais il ne sera quasiment plus cité après. Il semble qu’il est tranquillement aller faire tourner sa petite lune et n’a, littéralement, pas fait trop d’histoire.

Mais revenons encore sur ces trésors : Avec des mises en scène plus claires dans ces récits, on pourrait penser qu’il deviendrait plus facile de comprendre de quoi s’agît le magatama. Et bien non, car la spiritualité shintô est très énigmatique, même pour les Japonais. Si vous avez visité un sanctuaire au Japon, vous avez sûrement remarqué qu’il y a souvent cette partie qui délimite les mortels et les divinités. Il s’agît souvent même du bâtiment tout entier. D’ailleurs, la réplique du miroir de Yata est conservée au grand sanctuaire de Isé. Mais avez-vous vu ce miroir durant une excursion ? Non, mais c’est normal.

J’ai bien dit « réplique » concernant le mirioir, parce que parmi les trois reliques, seul le magatama semble être d’origine au détriment des deux autres qui sont perdus à jamais. Une théorie, encore une, rendant ce miracle possible est la proximité du bijou avec l’empereur au palais impérial. Encore aujourd’hui, les trois trésors sont utilisés lors du sacrement des nouveaux empereurs. Cependant, beaucoup de questions resteront sans réponses car ce rituel est strictement fermé au public. A part le peu de personnes pouvant y participer, nul ne sait vraiment quel est le rôle des régalias durant ce rite, y compris le magatama.

Finalement, il semble que j’ai abordé beaucoup d’élément pour ne finalement rien conclure. Même si cela peut sembler frustrant qu’un objet tant présent nous apporte plus de questions que de réponses, c’est aussi tout le charme du magatama. En plus, si son origine était trop claire, il se peut que son usage dans la culture populaire ait été délicat. C’est bien au contraire tout son aura énigmatique qui le rend si polyvalent. La seule information dont je peux m’avancer sans craintes, c’est qu’il s’agît bel et bien d’une figure sacrée aux pouvoirs mystérieux. Même si notre quotidien contemporain nous pousse souvent à vouloir tout sous contrôle sans incertitudes, porter un magatama peut nous rappeler une belle capacité que nous avons en tant qu’être humain: Faire confiance, tout simplement.

 

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