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Japoniser ses plats au quotidien

Même si les ingrédients japonais commencent à se faire une petite place dans les ménages occidentaux, il est souvent dommage de constater leur usage restreint aux recettes de leur pays d’origine. Depuis mon précédent article « La base de la cuisine japonaise », de charmantes réclamations me sont revenues concernant des bouteilles de soja ou miso qui ne se désemplissaient pas. Sur ce point, laissez-moi avant tout vous rassurer que ce sont des aliments qui se conservent très bien au frigo. Donc nul besoin de culpabiliser même si cela fait plusieurs semaines que vous ne vous êtes pas penchés sur vos contenants. En revanche, il serait bien triste pour eux d’attendre le jour où vous vous dîtes enfin « et si je cuisinais japonais ce soir ? ». Car aussi étonnant que cela puisse sembler, nombreux de ces ambassadeurs du umami japonais se marient à merveille avec nos assaisonnements d’ici !

Comme ce sont des recettes ou combinaisons qui se font souvent à l’œil, les étapes à suivre seront rédigées de manière très grossière. Mais pas de panique, c’est justement la preuve qu’ils sont d’une extrême simplicité ! D’ailleurs, mon but principal n’est pas de vous faire suivre des étapes à la lettre près, mais de vous inviter au contraire à faire vos propres expériences avec quelques repères. Les packagings bien exotiques avec des idéogrammes à tout va sur vos assaisonnements nippons vous ont souvent intimidés? Et bien cela sera dorénavant du passé!

Beurre et sauce soja :

Un classique connu sous le nom de バター醤油 / Bataa-shooyu et surtout un grand favori de mon grand-père ! Quand j’avais à peine trois ans, je le regardais curieusement faire fondre un carré de beurre sur son bol de riz chaud avec un filet de sauce soja au petit déjeuner. Quand il me laissa goûter un peu de riz imbibé, j’ai été tellement conquise que cet instant devint l’un de mes rares souvenirs de cet âge-là en lien avec le goût ! Comme les produits laitiers ont rejoint l’histoire de la gastronomie japonaise seulement récemment, ce mariage atypique peut paraître bien surprenant. Mais je confirme qu’il en est tout autant délicieux ! Suite en passant, il m’est arrivé de manquer d’originalité durant un séjour au Japon en dînant à un Macdonald après avoir vu sur le panneau extérieur « Spécialité du moment ! Frites au beurre/sauce soja !». Un menu de fast-food cache souvent un goût inchangé d’antan qui nous ramène à notre enfance, mais je dois avouer que le repas de cette soirée-là avait un goût particulièrement nostalgique.

Recette de pâtes hyper facile au bataa-shooyu pour une personne :

  • 50/100 gr d’ingrédients qui trainent dans votre frigo
  • 100gr de pâtes qui sommeillent dans votre placard
  • 30gr de beurre
  • 2cs de sauce soja

Ouvrez le frigo et trouvez-y un aliment dont vous avez failli oublier la date d’expiration. Si cela peut vous aider, on a tous ce paquet de lardons échoué vers le fond. Rajoutons un peu de verdure avec des épinards qui risquent de flétrir bientôt dans votre barquette à légumes. Coupez vos trouvailles finement, ou en dés, et faîte les revenir dans une poêle à feu moyen. Entre-temps, cherchez cette boîte de spaghettis entamée dans votre placard et faîte les cuire dans de l’eau bouillante. Retirez les pâtes une minute trop tôt ou trop tard du feu, et égouttez-les afin de les rajouter dans la première poêle avec le beurre et la sauce soja que vous n’avez probablement pas mesuré. Mélangez jusqu’à ce que le tout s’uniformise et c’est déjà prêt ! Saupoudrez un peu, ou un paquet entier, de fromage rappé par-dessus selon vos préférences.

Que ce soit avec des fruits de mer, des légumes incluant de l’ail ou de l’oignon, de la viande qu’elle soit coupée ou hachée, ou encore des champignons de toute sorte… tant que cette partie des ingrédients se marient bien entre eux, vous ne pouvez absolument PAS vous rater ! En ce qui concerne les pâtes, il n’y a aucune obligation de choisir un seul parmi les spaghettis, pennes, macaronis ou même une autre catégorie de féculents comme du riz, des pommes de terre (sous toutes les formes possibles). En bref, tout se passera bien tant qu’on ne fait pas brûler le beurre.

Huile d’olive et Miso :

Avant d’aborder cet autre couple un peu provocateur, mettons un point au clair une fois pour toutes. Le miso peut se manger cru ! Il est même considéré comme idéal de le cuire le moins possible, et c’est justement pourquoi il est conseillé de retirer la casserole du feu aussitôt qu’il a été incorporé dans la soupe du même nom. Prenez une cuillère, plongez-la dans votre boîte de Miso et goûtez directement pour voir. Osez me dire que ce n’est pas délicieux ! Je vous recommande seulement de faire attention à ne pas incorporer d’humidité ou d’ustensile usagé dans votre pack afin d’éviter que de la moisissure ou des bactéries ne se développent. Donc, je vous prie de reposer cette cuillère et de ne pas la remettre dedans. Même si vous en mourrez d’envie.

Penchons-nous plutôt sur les possibilités multiples que le miso cru a à nous offrir soudainement !   Nous sommes d’accord qu’il est un peu trop ferme pour servir de sauce, et trop salée pour nous servir de dip. Alors négocions un entre-deux en y incorporant de l’huile d’olive !

Dip de serré au miso et huile d’olive:

  • 50gr de fromage serré (ou autre fromage frais peu salé)
  • 2cs d’huile d’olive
  • 1cs de pâte miso

Prenez un petit bol et fouettez-y l’huile d’olive et le miso avec une petite spatule ou fourchette. Aussitôt que la pâte japonaise commence gentiment à se dissoudre dans l’huile, versez le tout par-dessus le serré. Mélanger ou ne pas mélanger, c’est à vous de choisir car les deux versions se valent autant l’un que l’autre.

Pas difficile du tout n’est-ce pas ? Ce mélange se marie à merveille avec des nombreux crudités, crackers ou pains. Si vous souhaitez impressionner des convives avec cette recette un tantinet originale et parfaite pour un apéro, saupoudrez le tout avec un peu de negi ou ciboulette pour un résultat appétissant à l’œil. Il est aussi intéressant de tester d’autre variantes à partir de cette base ou de même changer les ingrédients. Par exemple, ma mère mélange souvent du miso avec de la mayonnaise à l’ail pour accompagner des légumes en été. Pour un parfum nous faisant voyager en Asie, pourquoi ne pas essayer le miso dans de l’huile de sésame pour nos salades ? Quand je manque de temps, il m’arrive souvent de couper de la mozzarella en tranche puis de les aligner sur un pain toasté et de mettre l’huile d’olive au miso par-dessus. Vous pouvez aussi faire une variante plus protéinée de cette dernière recette avec du jambon ou blanc de poulet à la place du fromage. Ou encore, selon le pain que vous utilisez à la maison, une version végane en optant pour du tofu.

Ketchup et sauce soja :

Bien que j’aie dit que les recettes soient faciles et qu’on se réjouisse de ce retour soudain de la sauce-soja, celui-ci aura peut-être besoin d’un peu plus de maitrise pour la simple et bonne raison que ces deux condiments ont un goût très prononcé. Revenons sur un élément que j’ai abordé dans mon précédent article « la base de la cuisine japonaise » : la soustraction des saveurs. Si un mélange d’ingrédients semble trop fort voire écœurant, il faudra adoucir le tout. C’est là que le mirin et le saké rentrent normalement en jeu, mais pour cette combinaison, vous pouvez aussi opter pour du vin rouge qui remplit bien ce rôle et se marie à merveille avec le ketchup.

Steak de viande hâchée (hambaagu) à la japonaise :

  • 2 steaks de viande hachée (bœuf ou porc ou mixte)
  • 2 cs de ketchup
  • 2 cs de sauce soja
  • 2 cs de sucre
  • 2 dl de vin rouge

Avant tout, si vous en avez le courage, n’hésitez pas à faire des steaks de viande hachée vous-même en incluant du panko ainsi qu’un œuf pour qu’ils soient particulièrement liés. Faîtes les cuire à feu moyen dans une poêle jusqu’à ce qu’ils soient à point et libèrent un peu de jus. Si vous avez un doute concernant la cuisson, piquez une baguette au cœur d’un steak et vérifiez si le jus qui en sort n’est rouge. Retirez les steaks de la poêle et mettez-les momentanément dans une assiette à part. En gardant le feu moyen, versez la sauce soja et le ketchup dans le jus. La sauce est déjà délicieuse à ce stade, mais si elle semble trop riche, vous pouvez ajouter le reste des ingrédients afin de l’adoucir et la rendre moins acide. Faîtes cuire jusqu’à ce que l’alcool du vin s’évapore et remettez-y les steaks. Laissez mijoter le tout pendant une dizaine de minute et c’est prêt ! Avec du riz, une soupe miso et un accompagnement de légumes, vous aurez un repas qui donne typiquement le sourire aux plus petits et grands dans les foyers japonais ! Bien sûr, nul besoin de limiter cette sauce aux étapes décrites car il existe de nombreuses variantes délicieuses. D’ailleurs la recette la plus connue utilise de la sauce Worcestershire à la place de la sauce soja. Et pourquoi ne pas rajouter des oignions ou ail dans le jus, ou de remplacer à nouveau le vin par du mirin pour un goût plus proche du teriyaki, ou de tenter de mettre un peu de miso vers la fin… c’est une recette avant tout familiale donc la seule limite est votre imagination et vos papilles!

Curry et ponzu: 

Celui-ci doit probablement surprendre les Japonais aussi car avant d’être une combinaison atypique, c’est surtout un bel accident de ma vie. Un soir où mon conjoint et moi attendions des proches pour le dîner, je m’étais lancée dans la conception d’un curry indien butter-chicken. Parmi nos convives, un ami d’origine indien était déjà au taquet pour expertiser mon plat. Aussitôt qu’il goûta une cuillérée de la casserole, je fus avant tout rassurée par un « Pas mal du tout ! » mais il me conseilla de rajouter un peu de citron. J’ouvris mon frigo en espérant trouvé un citron oublié ou une de ces bouteilles jaunes contenant du jus mais sans succès. A la place, je ressortis une bouteille de ponzu rempli d’un quart. Ah mais suite en passant, le ponzu est une sauce à base de jus d’agrumes (Yuzu ou citron) et sauce soja, donc voilà une autre d’idée de condiments à mélanger ! Après que j’expliquai à mon ami de quoi il s’agît, nous avons pris une louche de curry pour le mettre dans un bol à part et tentions l’expérience de ce mélange doublement exotique. Le verdict ? Nous avons vidé la bouteille de ponzu dans la casserole principale. Le jour suivant, ce même ami m’envoya un message me demandant de lui rappeler comment s’appelle cette fameuse sauce japonaise pour qu’il s’en procure aussi.

A l’occasion, il faudrait que je lui fasse goûter un curry japonais pour qu’il m’en dise des nouvelles aussi.